10 Février 2020
Par l'intermédiaire de mon activité de freelance, j'ai eu l'occasion de croiser Laurent Elvetici, qui est sales manager chez Wave Distil, producteur des whiskies August 17th.
J'ai eu l'occasion de tester toute la gamme, qui se décline en trois grandes lignes.
Il est évident que nous ne sommes pas en face d'une distillerie écossaise de 150 ans, je ne l'y comparerai pas, je ne la jugerai pas de cette manière.
Nous avons la série August 17th maturation Porto/Cognac, déclinée en 3Y, 5Y Brutus et 7Y Julius.
Ensuite le Skot'Tiche, réalisé sur base du 3Y Porto/Cognac et fûts neufs et puis sept versions placées sous le label Single Cask W... avec un focus sur les finitions.
Alors, la première fois que j'ai vu ça, j'étais vraiment inquiet je ne le cache pas, des fûts de Porto et de Cognac croisés avec une finition Banyuls pff comment dire... je n'y aurait pas été spontanément.
Mais à l'image d'un Miclo et des ses fûts de liqueur de cerise... voilà un produit qui se veut résolument différent, c'est bien de cette façon que j'ai abordé le sujet, j'ai placé ce que je connais du whisky dans une petite boite pour simplement juger le produit sur ses qualités et éventuels défauts.
Ce n'est pas un article partisan, pas question d'essayer de vous convaincre de quoi que ce soit, mais qui souhaite un peu bousculer une sorte de morale unique censée désigner ce qui a sa place ou pas dans ce petit monde.
Nez : Nous sommes directement plongé dans l'univers du Marsala, qui pourrait être celui d'un vin de même nature. Avec ce côté raisins sucrés, des notes d'oxydation. C'est assez puissant et atypique. Des épices viennent partager l'avant plan. L'ensemble est gras, bien fruité, mais sans basculer dans l'extrême bizarrerie, ça reste cohérent et identifié whisky.
Bouche : Immanquablement ça reste très marqué, plus que la moyenne je dirais, probablement pour deux raisons. La première est que la partie Marsala du vieillissement est pratiquement égale à la première phase de maturation et la seconde est que nous sommes sur un whisky qui est encore un peu jeune et plein de vigueur. Mais encore une fois ça passe très bien, avec une dose de bois, d'épices justement dosées. Je retrouve cette présence du raisin, de l'oxydation qui rendent ce whisky différent et je crois que c'est ce qui est recherché ici.
Finale : Belle longueur, sur ce moût de raisin.
Nez : La fumée est fine et accompagnée de notes acidulées, citronnées. Très franchement sur cette phase de la dégustation, je pourrais croire en un jeune Islay sans aucun problème. Vraiment bien marqué par le côté salin, gras, malté. J'imagine un truc genre Peat de chez Elements of Islay ou quelque chose dans le genre.
Bouche : Gras à souhait, sur des fruits secs. Sucrosité du malt et salinité...bah du sel. Franchement très très beau whisky, sans aucun défaut. La fumée est bien placée, le niveau d'alcool aussi. Décidément ces fûts de Laphroaig ça marche du tonner, j'avais déjà eu l'occasion de tester un Penderyn, exactement sur les mêmes bases et c'était aussi une réussite. C'est vif, pétillant, une épreuve qui désigne un bon distillat de départ.
Finale : Salée et longue sur des influences fruitées, légèrement acidulées. Orange, citron. Un petit côté antiseptique sur la toute fin pour signer le produit. Je recommande vivement à la marque de poursuivre ce genre de finition, ça va devenir un classique.
Nez : Gras, riche. Notion de pierre à fusil qui aura tendance à vouloir s'imposer. Je dirais que malgré une première maturation qui aura bien participé à la construction de ce whisky, la finition est tout de même bien présente. Fruits jaunes, traces d'oxydation, petite acidité. En même temps c'est miellé, vanillé.
Bouche : Vraiment douce, tant d'un point de vue de l'intégration de l'alcool, que des saveurs. Maturation très particulière, whisky très particulier. Toutefois il est juste agréable, même s'il est plutôt compliqué à analyser. Je dirais qu'elle correspond au nez en gros. Bien miellé et vanillé, avec ce raisin typique, sucré, sec, oxydé. Vanille, fruits jaunes, prunes, mirabelles. C'est bien enveloppant et encore une fois bien équilibré. Bref étonnant et je serais curieux d'avoir plus d'avis de personnes l'ayant dégusté.
Finale : Il y a un côté bourbon, sur la vanille ou quelque chose de similaire. Il y a encore de petits fruits jaunes, petites prunes, mirabelles... Nougat.
Nez : Nous ne sommes pas sur un sherry monster de toute évidence. Je trouve des notes de sous bois, de champignon, terreuses aussi, c'est particulier.
Bouche : Je dirais qu'il y a ici d'abord les épices et ensuite le sherry. Du bois bien sec. Puis arrive sur la pointe des pieds, ce bagage de chocolat, café, orange un peu amère. Un ensemble un peu plus sirupeux, sur une macération de plantes aromatiques. Ça va gagner en complexité, mais alors lentement. Du coup toujours équilibré, alcool bien intégré et suffisamment dosé.
Finale : Elle s'assèche lentement, avec du bois neuf. Avec un peu d'ouverture, il restera ces plantes macérées, de l'orange amère. La fin de bouche et la finale révèlent bien plus le produit que le nez.
Nez : Pour tout dire, j'ai goûté celui-ci juste après le W.06 juste ci-dessous, car j'imaginais qu'il serait plus complexe. Du coup je crois que j'ai bien fait car d'emblée je suis surpris par un style très différent et généralement plus floral. Si les arômes sont relativement fondus, ou trop divers, il semble que les fruits se démarquent, mais aussi les épices. Il y a un côté pruneaux, abricots secs, un peu poussiéreux aussi. Je manque de points de comparaison, cette maturation n'est pas commune.
Bouche : C'est amusant comme se côtoient un monde d'épices et un touché crémeux, fruité. Franchement ce n'est pas commun, mais comme sur l'ensemble de la gamme c'est équilibré, sans défaut. J'ai cette même sensation d'être un peu égaré dans un méli-mélo de saveurs, car tous les fûts ici employés se rencontrent lors de finitions et individuellement d'ordinaire. Pour mon goût personnel, c'est un peu trop, mais j'ai constater son succès auprès des visiteurs du salon du whisky de Liège, donc les goûts et les couleurs... Tout comme pour le nez, je dirais que nous sommes sur un ensemble de vin, de fruits confits et d'épices, mais difficile d'en distinguer clairement les contours.
Finale : Malgré son profile atypique, il n'aura pas basculé dans les extrêmes et c'est ce que je retiens. Il reste des épices et ce mélange de fruits confits. Juste un peu de sécheresse.
Nez : Son style vineux est directement perceptible, sa fraîcheur préservée offre une sensation agréable d'équilibre. Il y a beaucoup de douceur, un aspect liquoreux, miellé, appréciable. J'ai la sensation d'avoir une oxydation sur l'aspect vineux, mais aussi un peu de sous bois, de champignons fraîchement ramassés. Ensuite des notes d'ananas, de chocolat blanc, de fruits confits.
Bouche : S'il y a un peu d'épices et de bois qui composent la première bouche, c'est bien tout cet apport du raisin sec et sucré qui vient recouvrir le tout d'un manteau de sucre liquide. L'aspect chocolaté s'accompagne d'orange confite et globalement de pâtes de fruits.
Finale : De bonne tenue, cette finale va conserver fraîcheur et énergie. Il y a des épices toujours et du boisé qui assèche légèrement. L'aspect raisin se fait moins liquoreux, revient sur son aspect frais et juteux.
Nez : Le dernier, celui qui sur papier rentre le plus dans le rang. Vif, bien fruité, avec un peu de cannelle. Vanille, miel et pomme s'associent de belle manière, pour offrir une bonne expérience, bien gourmande comme il faut. Pour 5 ans, ça ne semble pas manquer de maturité.
Bouche : La bouche est très douce, avec de beaux fruits frais et sucrés, comme la pomme. Pâte d'amandes qui s'exprime pleinement. C'est gras et enveloppant, onctueux. De toutes petites notes de poivre blanc viennent donner un peu le change, c'est un équilibre qui me convient très bien.
Finale : De la pomme fraîche, verte, sans trop d'acidité, mais bien juteuse. Miel et vanille ne se quittent pas jusqu'au bout. Bah rien à dire de plus que c'est bien foutu dans son genre.
August 17th 5Y "Single Cask W04" 3Y Oak Barrel + 2Y Xéres Olorosso 361 Bottles. 43% 70cl.
Avec l'aimable autorisation de www.passionduwhisky.com
Une grosse session de dégustation qui s'achève sur plusieurs constatations.
D'abord le distillat de départ me semble très bon, sans aucun défaut. Ça se remarque essentiellement sur les versions Bourbon et Oloroso je trouve. Nous sommes en terrain connu et il est plus simple de faire des comparaisons avec d'autres produits de cette catégorie.
Deuxièmement nous avons 7 produits très différents, qui me font un peu penser à Arran dans ses débuts. Je veux dire que ça va dans toutes les directions et il y aura probablement de petits ajustements qui seront effectués avec le temps et l'expérience. Tout n'est pas à mon goût propre, mais je reconnais un attachement au fait de vouloir développer son propre style et c'est très bien.
Ensuite l'équilibre, qui malgré des choses qui sur papier ne m'attireraient pas du tout est une constante sur toute la gamme, bah bravo pour ça. C'est aussi vrai dans les réductions, qui sonnent très juste.
En bref à suivre, tant dans les futures sorties, que dans le développement de la société, qui devrait définitivement installer ses alambics en Wallonie et ainsi éviter d'être réduite à la boite qui va distiller en France. D'autant que l'utilisation d'un même matériel, d'un même procédé devrait être le signe de la tenue de son style.
Pour conclure, j'ai vraiment besoin de vos avis sur le sujet, si vous avez eu l'occasion de tester cette gamme... Peut-être le week-end dernier à Liège lors du festival whisky.