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Passion du Whisky

El Dorado Rare Collection 'Enmore 1993'

 

  • El Dorado  Demerara Rum Marque EHP 'Rare Collection' Enmore 1993 / 2015. 56,5%.

 

Un rum lourd, aux reflets cuivrés, dont les jambes glissent langoureusement sur les bords de mon verre.

 

Nez : Épais, il offre du sucre de canne liquide Il y a du bois vernis, des fruits très mûrs. L'ouverture apporte des notes de café, de caramel, de vanille. De la cannelle et de la muscade viennent apporter un peu de piquant. Vraiment tout ce que j'aime, ne manque qu'un apport pétrolifère pour être totalement comblé. L'ouverture donnera encore de ce genre de gaufrette moka, ainsi que de petites confiseries à la cerise. Malgré sa lourdeur, il y a un bel équilibre, il n'est pas dénué d'une certaine fraîcheur.

 

Bouche : La bouche est nettement plus sèche, astringente même. Elle est d'une intensité exceptionnelle. Il y a toujours de ce sucre brun dont la puissance conduit à l'amertume. Des fruits exotiques confits, mêlés de vanille, de café fort. Intense mais sans agressivité, sa puissance semble calibrée à son caractère volontairement indomptable et généreux, un tendre voyou en somme. 

 

Finale : Amer et boisée. Des fruits secs. Elle va atteindre un haut niveau de sécheresse à laquelle pourtant va s'opposer une certaine fraîcheur provenant de l'eucalyptus. Il y a encore de ce café juste moulu, de la banane et de l'ananas cuits ou rôtis. En d'autres termes, je commencerais bien ma collection avec celui-ci.

 

 

Lorsque j'ai commencé à m'intéresser au whisky, sans m'en rendre compte je mettais le nez dans un monde ultra complexe, car outre la production en elle même qui reste facilement accessible, le temps et l'industrie qui s'est développée ont rendu la chose plus opaque.

 

Ouverture, changement de mains, fermeture, ré-ouverture, incendies en pagaille... ici aussi il fut question d'alambics qui sur leurs petites papattes voyagèrent d'une maison à l'autre, bref de quoi spéculer pour l'éternité.

Fort heureusement le temps, je l'ai eu et j'en ai consacré je peux le dire énormément à ce divin nectar, parfois sans aucun retour, ni encouragement, mais qu'importe, ma passion a été grandissante.

 

Puis un jour comme si les astres avaient décidés de me dévier de ma trajectoire, deux personnes pour lesquelles j'ai une profonde estime viennent me voir pour me dire "Tiens goûte ça!".

Le premier est Bernard Demiautte, avec ses embouteillages maison de chez "Compagnie des Indes" et le second Bert Bruyneel avec ses embouteillages "Rasta Morris", dont un vieux Caroni Cask Strength que je ne suis pas prêt d'oublier.

Conclusion me voilà bien, avec l'idée qu'en effet le Rhum y'en a du bon et l'envie d'en apprendre plus,... question de nature.

 

Me voilà pris d'un syndrome comparable que pour le whisky, la fabrication ça va, enfin ça commence, puis-qu’après la lecture de "L'Atlas du Rhum" de Luca Gargano, conseillé par un traître au whisky que je nommerai ici puisque c'est un ami que j'estime également Fed. Muller, je conclus rapidement que je devrai le relire disons plusieurs fois pour faire simple et dans ce cas nous ne parlons que des distilleries des Caraïbes, enfin que..., ça représente tout de même quelques genres.

 

Mais alors ces histoires de fermetures, d'alambics transférés d'un endroit à l'autre, de labels qui correspondent aux noms de ces mêmes alambics, de marques qui continuent d'exister bien que la distillerie elle même soit éteinte etc... c'est chaud et je ne parle pas que du climat de ces régions du monde.

Sur quoi nous pouvons rebondir sur les maturations tropicales ou continentales, les colonnes Savalle, Créoles, le high ester, la vinasse...blup blup pour le moment je nage en surface.

 

Bref, dans quoi ais-je mis le nez cette fois ?

 

Tout ça pour dire que tant qu'il y a de la passion, il y a de la vie, ou le contraire je ne sais plus et que je sais pouvoir compter sur des âmes damnées pour me faire voyager dans cette autre univers que j'estime probablement aussi vaste que celui qui restera à jamais dans mon cœur le premier, celui du whisky.

 

Pourvu que ça dure et merci.

Alors Enmore est en effet le nom d'un alambic qui appartenait à une distillerie du même nom et qui fut transféré dans la dernière distillerie en fonction de Guyane britannique, Diamond, à sa fermeture, c'est à dire en 1995.

Diamond par ailleurs possède neuf alambics, tous différents, ce qui permet de produire une vingtaine de références également différentes les unes des autres.

 

Si le pays était riche d'environ 300 distilleries vers l'an 1700, il n'en reste qu'une à ce jour.

 

C'est Christophe Colomb qui découvre les lieux en 1498, toutefois ce sont bien des Hollandais qui y développent la culture de la canne dans les années 1640.

La production de sucre s'y banalisera, mais c'est durant la décennie suivant que les britanniques vont y ajouter comme une touche personnelle, teintée d'alambics et de vapeurs d'alcools.

Cela devint tellement populaire que chaque plantation possédera sa propre distillerie de mélasse et que la marine royale inclut une ration journalière de cette potion au menu de bord dès 1677.

Cinquante cinq ans plus tard naquis Port Mourant Estate dont l'alambic double en bois fit couler un rum si caractéristique qu'il fut longtemps le compagnon de voyage des marins de sa majesté.

Cette ration fut supprimée le 31 juillet 1970 et fut surnommé le black tot day.

Il faut savoir que cette ration est passée de plus de 50cl par jour à l'origine, à un bon gros glencairn en 1970.

Il faut reconnaître que 50cl c'était peut-être un peu abusé... 

 

À sa fermeture, Port Mourant verra son alambic d'abord transféré à la distillerie Uitvlugt qui elle même fermera, avant d’atterrir définitivement dans les murs de Diamond en 2000.

Il en ira de même pour Versailles, qui passera par Enmore et Uitvlugt avant de rejoindre le trio mythique sur les bords de la rivière Demerara, avec Enmore, ce Coffey en bois datant de 1880.

 

Durant le 18ème siècle les sucreries vont fermer en nombre et il en restera moins de 200. Toutefois le rum produit ne perdra rien de sa popularité, bien au contraire.

Mais la réalité actuelle démontre que l'activité ne cessa de diminuer, jusqu'à atteindre le seuil critique.

Diamond est la dernière, mais elle recèle encore les trésors, le vrai El Dorado de la région, des alambics incroyables et un savoir faire vieux de plus de 300 ans.

 

La distillerie possède également la colonne Savalle de la distillerie éteinte Uitvlugt.

Sa marque emblématique est El Dorado, produite à partir de ces alambics, avec des versions agées de 12, 15 et 21 ans.

 

C'est un bon début non, vous ne trouvez pas ?

 

Merci à Arnaud Demiautte pour cet échantillon.

Il reste je crois une ou deux bouteilles de ce jus en magasin et pour avoir communiqué à ce propos dernièrement avec lui, il y aura dans la future salle de dégustation d'autres bestioles dans le genre qui feront également des ravages.

 

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